Les Alcooliques Anonymes sont une association d’hommes et de femmes qui partagent entre eux leur expérience, leur force et leur espoir dans le but de résoudre leur problème commun et d’aider d’autres alcooliques à se rétablir.
• Le désir d’arrêter de boire est la seule condition pour devenir membre des AA. Les AA ne demandent ni cotisation ni droit d’entrée ; nous nous finançons par nos propres contributions.
• Les AA ne sont associés à aucune secte, confession religieuse ou politique, à aucun organisme ou établissement ; ils ne désirent s’engager dans aucune controverse ; ils n’endossent et ne contestent aucune cause.
• Notre but premier est de demeurer abstinents et d’aider d’autres alcooliques à le devenir.
Avez-vous un problème d’alcool ?
Il y en a beaucoup parmi nous qui ont du mal à admettre et à accepter qu’ils ont un problème d’alcool. Parfois, l’alcool semble être la solution à nos problèmes, la seule chose qui nous rende la vie supportable. Mais si nous constatons, en examinant honnêtement notre vie, que des problèmes semblent survenir lorsque nous buvons — à la maison ou au travail, problèmes de santé, de stabilité émotive ou même de sociabilité — alors il est fort probable que nous ayons un problème d’alcool.
Pour certains d’entre nous qui souffrent d’un trouble de santé mentale, il peut aussi être difficile d’accepter le fait que l’alcool leur attire des ennuis. C’est la maladie mentale qui est le problème, pas l’alcool, pensent-ils. Pourtant, nous apprenons chez les AA que tout le monde peut souffrir de la maladie de l’alcoolisme. Nous apprenons aussi que quiconque veut arrêter de boire peut trouver aide et rétablissement chez les Alcooliques anonymes.
Les témoignages qui suivent relatent les expériences vécues par 12 femmes et hommes — tous des alcooliques aux prises avec de sérieux problèmes de santé mentale — qui ont découvert l’abstinence et un nouveau mode de vie chez les Alcooliques anonymes. Ces récits représentent leur expérience, leur force et leur espoir.
Vous trouverez également dans cette brochure le point de vue de cinq membres des AA avec plusieurs années d’abstinence qui ont travaillé de près, en tant que parrains et marraines, avec des alcooliques souffrant de maladie mentale, les aidant à cesser de boire et à demeurer abstinents à l’intérieur des AA. Aussi, à la fin de cette brochure, une postface basée sur la vaste expérience des AA et des professionnels de la santé aidera les membres à trouver le meilleur équilibre possible en ce qui concerne les médicaments et à réduire les risques de rechute.
Si vous pensez que vous avez un problème d’alcool et que vous souffrez en même temps d’un trouble de santé mentale, il se peut que vous vous reconnaissiez dans ces témoignages. Nous espérons que vous découvrirez, comme ces hommes et ces femmes l’ont fait, que vous êtes le bienvenu chez les Alcooliques anonymes, et que vous aussi trouverez une nouvelle liberté et un nouveau bonheur dans ce mode de vie spirituel.
« D’avoir appris à composer avec la maladie mentale m’a permis de me concentrer pleinement sur mon alcoolisme. »
Ça a commencé par un manque de jugement. À 16 ans, j’avais presque terminé l’école secondaire quand j’ai commencé à sécher les cours régulièrement pour aller boire avec d’autres jeunes qui étaient dans le même état d’esprit. À la maison l’atmosphère était souvent orageuse et mes crises émotives repoussaient mes parents de plus en plus loin. L’alcool était ma « clé » pour entrer dans le monde et me faire des amis facilement. Très vite, mon anxiété sociale et ma nature introvertie fondaient ; je devenais tapageuse, extravertie et pleine d’assurance. L’alcool était la réponse que j’avais cherchée… Comment pourrait-il jamais me trahir ?
Après ce premier verre, je me suis mise à boire tous les week-ends. Quand la dépression me submergeait pendant des semaines et des semaines, je buvais les jours de semaine pour essayer de « compenser ». L’alcool engourdissait le supplice intérieur de la dépression et le gardait à distance. Plus je buvais, cependant, plus je devenais dépressive. La « boute-en-train » était maintenant une adolescente isolée et extrêmement déprimée qui buvait seule dans sa chambre.
Je savais que je n’avais qu’à attendre, parce que mon humeur changerait aussi rapidement qu’elle l’avait fait auparavant, et je me retrouverais bientôt au sommet du monde. J’ai réussi je ne sais comment à obtenir mon diplôme à l’âge de 17 ans, mais à l’époque je buvais déjà tous les jours et j’en étais réduite à voler pour payer l’alcool dont j’avais besoin. À 18 ans, je ne vivais plus chez mes parents ; j’avais emménagé avec deux hommes plus âgés qui subvenaient à mes dépenses d’alcool et me permettaient de rester sans payer de loyer. Je me suis rendu compte à ce moment-là que j’étais une alcoolique. Je suis entrée dans un centre de traitement la même année, et j’y ai fêté mes 19 ans. C’est aussi là que j’ai rencontré les AA.
La première chose que j’ai faite en sortant du centre de traitement fut de trouver une réunion des AA pour écouter d’autres alcooliques qui étaient dans le même état d’esprit. Durant ces premiers temps, il m’arrivait encore de rechuter et je me demandais, dans mes moments de sobriété, pourquoi j’étais encore tellement dépressive, bourrée d’anxiété et de désespoir, alors que d’autres jours j’étais si effrontée et remplie de moi-même que rien ne pouvait m’arrêter.
À la même époque, mes parents sont revenus dans ma vie : l’un des nombreux cadeaux dont les AA m’ont comblée. Ma mère a suggéré que je vois un psychiatre parce qu’il y avait peut-être quelque chose d’autre que l’esprit alcoolique qui expliquait mes comportements. Après de multiples visites chez le psychiatre, j’ai reçu un diagnostic de trouble bipolaire à cycles rapides. Petit à petit, nous avons fini par trouver la bonne médication, et je prends maintenant une petite dose chaque matin.
Les doubles diagnostics sont fréquents, mais je tiens à dire que le fait de traiter ma maladie mentale a amélioré ma vie de manière exponentielle. Je peux répondre au téléphone, parler devant des inconnus, me faire des amis ; mes humeurs sont plus stables et j’ai maintenant assez d’expérience pour gérer les phases maniaques et dépressives lorsqu’elles se présentent. Je n’ai plus besoin d’avoir recours à la bouteille, puisqu’elle n’a jamais été le remède que je croyais ; c’était un masque, et boire n’a jamais rien réglé : tous mes problèmes étaient encore là, qui attendaient simplement que je dégrise.
Même si je gère ma maladie mentale, il me reste encore à gérer mon alcoolisme en assistant et en participant activement à des réunions, en parlant à mon parrain et en mettant les Douze Étapes en pratique dans ma vie de tous les jours. Sans toutes ces choses, je ne vis qu’à moitié. D’avoir appris à composer avec ma maladie mentale m’a permis de me concentrer pleinement sur mon alcoolisme, et aujourd’hui je peux dire avec assurance que je suis une alcoolique rétablie.
AA m’a aidée à trouver le bonheur, l’amour et la tolérance à l’égard d’autrui ; la grâce d’une puissance supérieure ; et la stabilité émotive. J’ai maintenant une relation avec mes parents et avec ma sœur que je n’avais pas auparavant, et je compte aller un jour à l’université. Abstinente et reconnaissante, je remercie ceux et celles dans le Mouvement qui m’ont encouragée à revenir et à persévérer jusqu’à ce que le miracle se produise pour moi. Le miracle se produira aussi pour vous, si vous avez de la bonne volonté.
« Je passais plus de temps à tenter d’expliquer que je n’étais pas une alcoolique. »
La maladie mentale court dans ma famille. J’ai essayé de me suicider à l’âge de 9 ans. À l’adolescence, j’étais fortement médicamentée parce que j’entendais des voix qui m’ordonnaient de me couper et de me brûler la peau. J’ai passé la plus grande partie de ce qui aurait dû être ma première année à l’école secondaire enfermée dans une aile psychiatrique. Les docteurs ont dit à mes parents que j’étais schizophrène, que je ne serais jamais normale. Pendant vingt ans, ma vie ne fut que médication, cellules capitonnées, innombrables hospitalisations et tentatives de suicide.
Personne ne m’a jamais demandé si je buvais, et je n’allais sûrement pas fournir cette information volontairement. À l’âge de 12 ans, j’ai découvert que l’alcool m’aidait à dormir. Boire me détendait et m’aidait à passer au travers. Même adolescente, je ne pouvais pas imaginer ma vie sans l’alcool. Il y avait toujours une bouteille cachée sous mon lit.
J’utilisais aussi d’autres drogues — n’importe quoi pour engourdir mes émotions. Dans la vingtaine, j’étais assez désespérée pour essayer les AA. Toutefois, je n’étais pas prête à renoncer à l’alcool. D’ailleurs, mon problème principal était la maladie mentale, et si j’arrivais à la maîtriser, alors je pourrais aussi contrôler ma façon de boire. Je ne savais pas que le contraire était vrai : aussi longtemps que je boirais, il serait difficile de traiter ma maladie mentale.
Je me suis mariée et, après la naissance de notre fille, j’ai sombré dans une profonde dépression. À l’époque, j’avais reçu de nouveaux diagnostics, dont le trouble schizo-affectif, le trouble de la personnalité limite et la dépression majeure. Encore là, personne ne m’a parlé de ma consommation d’alcool. J’ai commencé à me saouler de façon périodique, ces cuites se terminant le plus souvent par une hospitalisation, une tentative de suicide, ou les deux. Il m’arrivait occasionnellement d’assister à une réunion des AA à l’hôpital, mais je passais plus de temps à tenter d’expliquer que je n’étais pas une alcoolique. Et puis, je ne croyais pas en Dieu. J’y avais cru quand j’étais jeune, mais je croyais maintenant que Dieu n’était rien de plus qu’une invention humaine.
Désespérant d’être libérée de mon problème d’alcool, je me demandais si je faisais partie de ces « malheureux » dont il est écrit dans Notre Méthode qu’ils sont « naturellement incapables » de comprendre ce programme. Toutefois, je n’avais pas lu la phrase précédente du chapitre cinq des Alcooliques anonymes : « Rarement avons-nous vu faillir à la tâche celui qui s’est engagé à fond dans la même voie que nous. » En fait, j’avais du mal à m’engager même à reculons dans la voie qu’on m’indiquait, sans parler d’y aller à fond. En vérité, c’est de ma maladie mentale que j’aurais voulu être libérée, pas de mon problème d’alcool.
Ma dernière tentative de suicide m’a presque tuée. À 35 ans, dans un motel, j’ai écrit une lettre de suicide à ma fille de trois ans avant d’avaler une combinaison de drogues et d’alcool que je savais létale. Le résultat fut une défaillance mutltisystémique, et la docteur m’a dit que j’allais tomber dans le coma et mourir en moins de 24 heures. Elle m’a dit de régler mes dernières affaires.
Après plusieurs décennies de peur et d’angoisse, j’ai lancé un cri vers le Dieu que j’avais abandonné il y a longtemps. Un calme m’a envahie et j’ai su que Dieu prendrait soin de moi, morte ou vive. Tout ce que je devais faire, c’était mon possible sans me soucier du résultat. J’ai dit adieu à ma famille et planifié mes funérailles. Je leur ai dit que je les aimais, que j’étais désolée, et que je n’avais pas peur. Pourtant, je ne suis pas tombée dans le coma. J’ai frôlé la mort pendant quelques jours. Ma puissance supérieure est restée toujours auprès de moi. Les docteurs ont déclaré que ce revirement de situation était un miracle. En sortant de l’hôpital, j’ai sauté tête la première dans les AA.
Avec un réveil spirituel aussi spectaculaire, je me disais que je resterais abstinente toute ma vie. Je me suis dépêchée de rattraper le temps perdu, mais bientôt, je me suis mise à sauter des réunions. Or, de la même façon que je n’aurais pas pu rester saoule avec l’alcool de la veille, je ne pouvais pas rester abstinente avec la réunion de la veille. L’obsession de boire est revenue et je me suis remise à boire après cinq ans de sobriété.
Je suis restée loin des AA pendant plus de 10 ans. Puis, ma précieuse fille — celle qui n’avait jamais eu à lire la lettre de suicide que j’avais écrite — a été hospitalisée pour maladie mentale. Mon thérapeute m’a fortement conseillé de retourner chez les AA. Encore une fois j’ai résisté, ne voulant pas abandonner ma précieuse bouteille.
Toutefois, j’y suis retournée, et cette fois mon réveil spirituel a été plus lent, plus réfléchi. Quoique lente, la recette restait et reste la même : si je suivais les suggestions qu’on me faisait, alors j’allais rester abstinente, ce qui en retour améliorerait ma santé mentale. C’est comme le diabète : l’alcool aggrave le diabète, et renoncer à l’alcool aide le diabétique. Il en va ainsi de ma condition psychiatrique. Ma sobriété est capitale pour tenir la maladie mentale en échec.
Abstinente depuis plus de 10 ans, les AA m’ont donné une liberté totale. Parce que je suis libérée de l’alcool, je suis libérée des ailes psychiatriques, des camisoles de force et des pensées suicidaires. Je mène une vie merveilleuse et très utile, et je vais de mieux en mieux.
« Je vivais le même genre d’euphorie sous l’influence de l’alcool que durant mes épisodes maniaques. »
Je m’appelle Jon et je suis un alcoolique. Je crois que je suis né avec une allergie à l’alcool, cette « réaction anormale ». Je crois que je suis aussi né avec une prédisposition à la maladie mentale. Le trouble bipolaire, dans mon cas.
Mon enfance fut relativement normale jusqu’à l’âge de 12 ans. J’ai alors sombré dans une dépression profonde et dévastatrice. J’étais malheureux, misérable et suicidaire. Cela persista durant trois ans. À 15 ans, j’ai pris la morne décision, les dents serrées, de ne pas me suicider. J’étais résigné à traîner ma carcasse jusqu’à la fin de ma triste et sombre vie.
À peu près au même moment où cette dépression a commencé, j’ai bu de l’alcool pour la première fois. Ma mère gardait une bouteille de vin ouverte, presque pleine, au frigo. Je me suis dit que je pourrais lui en voler un verre sans me faire prendre. Alors j’ai bu un verre de vin. Comme je l’ai dit, je suis allergique à l’alcool. Sans en avoir l’intention, j’ai bu le reste de cette bouteille de vin et je me suis saoulé jusqu’à en perdre la mémoire. Je n’avais pas d’amis qui buvaient, alors cela ne m’arrivait pas très souvent, peut-être une fois par année. Mais chaque fois que je buvais, je buvais toute la bouteille sans l’avoir voulu.
À dix-sept ans, après avoir commencé une nouvelle médication, je me couchais souvent très tard et un jour j’ai voulu prolonger ma nuit en sniffant des comprimés de caféine broyés. Cela m’a catapulté dans un épisode maniaque intense. Je croyais que la poussière sous la maison était infectée et que si je lançais des fleurs sous la maison, le problème serait réglé. J’ai perdu mes clefs mais j’étais persuadé que si je trempais une serviette dans l’eau de la piscine et que j’en donnais un coup sur les portes coulissantes, elles se déverrouilleraient. Mes parents m’ont parlé pendant quelques minutes avant de me conduire à l’hôpital, où je suis resté une dizaine de jours. J’ai reçu un diagnostic de bipolarité et on m’a prescrit une médication visant à stabiliser l’humeur.
Peu de temps après, je me suis inscrit à l’université où ma première année s’est déroulée sans incident. En deuxième année, je me suis trouvé par hasard à partager ma chambre avec un alcoolique. J’ai commencé à le suivre, lui et ses amis, et à faire ce qu’ils faisaient, c’est-à-dire boire. En plus d’annuler les effets de la médication, ce mélange de médicaments et d’alcool était nuisible pour le corps. Je m’en balançais. Je vivais le même genre d’euphorie sous l’influence de l’alcool que durant mes épisodes maniaques, et j’adorais ça. À un moment donné, j’ai subi un fâcheux accident : je suis tombé d’un balcon au premier étage et j’ai atterri face la première, ce qui m’a valu une mâchoire fracturée et dix-neuf dents endommagées. Quelques mois plus tard, je cessais de boire et peu de temps après j’assistais à ma première réunion des AA.
Pour moi, santé mentale et abstinence vont de pair. Si je buvais, tous les bienfaits que m’apportent mes médicaments disparaîtraient — et je cesserais fort probablement de les prendre, de toute façon. Cela me plongerait dans un épisode maniaque ou dépressif : dépressif, j’en arriverais peut-être à penser que je n’ai d’autre choix : le suicide ou le soulagement instantané par l’alcool ; maniaque, je perdrais contact avec la réalité et croirais que l’alcool n’est pas un danger.
Alors, je dois assister à des réunions, pratiquer les Étapes, parrainer et être parrainé, et participer à la vie de service pour rester abstinent. Je dois voir un psychiatre ainsi qu’un thérapeute et prendre mes médicaments pour éviter les phases actives du trouble bipolaire. Mais surtout, je dois rester abstinent pour éviter les phases actives du trouble bipolaire, et je dois éviter les phases actives du trouble bipolaire pour rester abstinent. Cela forme un tout et il faut le traiter comme un tout.
Si vous souffrez d’alcoolisme et d’une maladie mentale et que vous êtes nouveau chez les AA, ou si vous venez d’apprendre que vous avez une maladie mentale en plus de votre alcoolisme, il y a de l’espoir. Demandez à votre docteur et à votre parrain de lire la brochure « Le membre des AA face à la médication et autres drogues » ainsi que la brochure que vous lisez en ce moment, et faites tout ce que le docteur et ce programme vous diront de faire. Vous pouvez vous rétablir. Je l’ai fait.
« J’étais consternée de constater que je ne pouvais pas arrêter par mes propres moyens. »
Je me suis toujours demandé pourquoi j’étais si différente des autres. Il n’y avait pas que l’aspect extérieur qui me distinguait. J’avais du mal à l’école même si d’après les test j’avais un QI élevé. Mes amies étaient des têtes de classe, mais mes notes étaient basses et j’étais toujours soulagée de ne pas avoir été recalée à la fin de l’année. C’est devenu une source de découragement, car je ne me sentais jamais assez capable, jamais assez bonne.
Pour me rebeller, par contre, j’étais excellente. L’usage des drogues et de l’alcool est vite devenu un exutoire pour me retrouver en tête du peloton. Même les meilleurs élèves et les cracks en informatique aimaient boire et s’amuser, et je pouvais tous les faire rouler sous la table. Cela dit, j’avais encore des aspirations personnelles, et je suis entrée à l’université avec un espoir timide. Les fêtes étudiantes n’étaient rien de nouveau pour moi, mais quelque chose avait changé. Tandis que les autres pouvaient boire, passer leurs examens et les réussir, j’en étais incapable. Mes échecs n’ont fait qu’encourager ma rébellion par l’alcool et la fête ; c’était la seule sphère sociale où je ne me sentais pas inférieure.
En retard sur les autres et livrée à moi-même, j’ai établi mes propres règles. J’ai commencé à trouver des gens qui pouvaient boire et faire la fête autant que moi. Je me suis associée à un groupe dangereux, et ma vie a prit un mauvais tournent. J’ai été expulsée de l’université ; je perdais tous mes emplois et buvais de la vodka à même la bouteille du matin au soir. J’étais consternée de constater que je ne pouvais pas arrêter par mes propres moyens. Il m’a fallu passer encore quelques années à boire ainsi avant d’être prête à demander de l’aide. Par la grâce de Dieu, je me suis retrouvée un jour à genoux, brisée et désespérée, et prête à faire tout ce qu’il faudrait pour être libérée de ma dépendance.
J’ai suivi une cure de désintox durant laquelle le médecin en chef m’a dit qu’il était possible d’être « trop intelligent » pour les AA. Je savais que c’était de l’ironie, et j’étais juste assez désespérée pour me rendre compte que je devais m’accrocher à ce que le programme m’offrait et essayer de faire ce qu’on me suggérait, si je voulais rester abstinente un jour à la fois. Si j’analysais les choses à l’excès ou si je n’arrivais pas à établir un contact avec les gens qui partageaient leur expérience, leur force et leur espoir, je risquais de passer à côté de la raison même qui m’avait poussée à vouloir changer et amenée là où j’étais rendue. Lentement, un jour à la fois, mes idées se sont éclaircies, et il a été de plus en plus facile de ne pas boire et d’assister aux réunions.
J’avais le vague espoir qu’en arrêtant de boire, toutes les choses dans ma vie se replaceraient comme par magie et que les aspirations qui m’étaient chères se concrétiseraient. Le problème, c’est que j’étais toujours la même — une fille qui n’arrivait jamais à s’en sortir aussi bien que les autres. Même la pratique des Étapes et le déblayage des débris de mon passé n’avaient pas résolu ce problème pour moi. Les années passaient et j’étais toujours entre deux boulots, incapable de retourner aux études, et à nouveau de plus en plus découragée. À un moment donné, une amie qui était dans le programme avec moi depuis des années m’a suggéré d’aller chercher de l’aide extérieure. Je me souviens qu’elle a dit : « Ce n’est pas normal ce que tu vis, et ça ne coûte rien de demander de l’aide. » Je ne me rendais pas compte à quel point j’avais stigmatisé l’idée de faire une thérapie et toutes les questions de santé mentale. J’ai vu qu’elle avait raison.
J’ai consulté une thérapeute et j’en suis venue à aimer la voir autant que j’aimais assister aux réunions des AA. J’ai suivi la suggestion qu’elle m’a faite d’être évaluée par un psychiatre. Quand je suis revenue avec un diagnostic de TDAH et d’épisode dépressif, les choses ont commencé à s’expliquer. Il est devenu clair que les effets du TDAH sur mon travail, mes études et même sur ma vie sociale, avaient causé mon découragement et ma dépression. Pendant si longtemps ma solution avait été de boire pour fuir mes problèmes. Devenue abstinente, je n’avais plus besoin de boire un jour à la fois, mais j’avais encore des difficultés. Quand je me suis ouverte à recevoir de l’aide extérieure, j’ai commencé à développer des solutions au problème central qui me tourmentait depuis des années.
Depuis ce temps, j’ai réussi à être transférée dans une grande université. J’ai hâte d’aller étudier à l’étranger l’été prochain et de m’inscrire au troisième cycle à l’automne. Même si mes notes ne seront jamais parfaites, j’ai une confiance que je n’aurais pas crue possible en mes propres capacités de femme indépendante. Je serai éternellement reconnaissante aux AA de m’avoir donné les outils nécessaires pour demander de l’aide quand je l’ai fait, et le courage d’être ouverte et honnête.
« Ma haine de soi allait chaque jour en s’accroissant. »
Comme il fait noir juste avant l’aube ! J’étais assis dans une chambre à une seule fenêtre, le store baissé. Je buvais dans une noirceur qui était parfaitement assortie à mon humeur. Plein d’apitoiement, de découragement, de culpabilité et de honte, je considérais les choix qui s’offraient à moi. J’avais 14 ans et faisais l’expérience pour la première fois du trouble bipolaire que j’aurais à combattre pour le reste de mes jours. C’est aussi l’année où j’ai découvert l’alcool comme remède.
Ma première cuite m’a appris que l’alcool pouvait être un antidépresseur. Non seulement je me sentais bien pour la première fois depuis des mois, mais mon humeur était plus euphorique que jamais. La gueule de bois du lendemain m’a ramené en enfer, mais j’avais découvert la sortie de secours.
Il n’est pas étonnant que, parmi les bipolaires, la dépendance aux drogues et à l’alcool dépasse les 50 pour cent. C’est le médicament que nous employons pour contrôler notre humeur sans même le savoir. Ma drogue de choix — mon alpha et mon oméga — était l’éthanol. À cause d’elle je suis resté adolescent émotionnellement tout en vieillissant physiquement. J’ai épousé une fille merveilleuse et ravissante ; j’avais un deuxième boulot comme pianiste dans un orchestre, et les nuits bien arrosées ne manquaient pas. La vie était belle.
À l’université, j’ai fait un choix de carrière intéressant : devenir pharmacien. Il en a résulté de bizarres combinaisons de drogues et d’alcool. J’étais attiré par les dépresseurs parce qu’ils se mariaient bien avec l’alcool et pouvaient même le remplacer. À la page 25 du Gros Livre, Les Alcooliques anonymes, on lit : « À mesure que les choses s’aggravent, il se tourne progressivement vers des sédatifs puissants qu’il mêle à l’alcool pour se calmer et être en état de se rendre à son travail. »
J’ai trouvé un emploi où je travaillais seul la nuit dans un hôpital, ce qui me semblait idéal. Je pouvais me rendre à mon travail en état d’ébriété et y avoir accès à des médicaments. Je gardais de l’alcool dans l’auto pour le retour à la maison.
Dans le Gros Livre, à la page 6, le cofondateur des AA, Bill W. a décrit ma vie en huit mots : « Les choses se sont détériorées peu à peu. » Mon humeur est devenue de plus en plus dépressive, j’ai commencé à suivre une thérapie et j’ai consulté un psychiatre qui m’a dit simplement, au sujet de ma consommation d’alcool : « Ne faites pas ça. »
À 28 ans, j’ai décidé de m’empoisonner lentement en utilisant une drogue dont les effets imitaient ceux d’une maladie mortelle du sang. Ma haine de soi allait chaque jour en s’accroissant pendant le mois où je me suis administré cette drogue quotidiennement. Bien que je me sois rendu malade, il semble que mon corps sain n’a pas voulu coopérer avec mon esprit malade. Après avoir abandonné mon projet, je suis allé m’asseoir avec une bouteille dans ma salle de séjour. C’était soudain évident : j’allais boire jusqu’à la mort.
Déçu qu’on ne m’ait pas permis de changer mon horaire de travail (alors qu’on aurait dû me congédier), j’ai acheté une bouteille de scotch, assez de cyanure pour tuer une douzaine de personnes, et me suis attelé à la tâche d’écrire une note d’adieu.
Quand je me suis réveillé, le scotch était bu… et le cyanure était intact. Comme il fait noir juste avant l’aube !
J’ai été subir un examen de routine chez un nouveau médecin (l’ancien insistait pour parler de mon foie et de ma tension artérielle). Ce nouveau médecin avait la réputation d’avoir été un fort bon buveur, ce qui pour moi était la meilleure recommandation qui soit. Ce que j’ignorais, c’est qu’il avait cessé de boire depuis 6 ans chez les AA. Il m’a raconté son histoire et, bizarrement, j’ai compris ce qu’il disait. Il ne m’a pas parlé de ma consommation d’alcool, mais il m’a invité à ma première réunion. Je lui ai dit que j’étais « trop occupé ce soir », mais il m’a répondu on ne peut plus sagement : « Si jamais tu veux assister à une réunion, appelle-moi et j’irai t’y retrouver. » Puis il m’a donné son exemplaire du Gros Livre.
Deux semaines plus tard, agité par la peur et les tremblements, je l’ai appelé. La magie des Alcooliques anonymes s’est opérée pour moi dès cette première réunion, et je suis resté abstinent sans interruption depuis. Mais ma santé mentale ne s’est pas améliorée immédiatement. Après l’incident du cyanure, j’ai été traité par des psychiatres compétents qui ont diagnostiqué chez moi un trouble bipolaire et m’ont prescrit du lithium. La première année fut comme des montagnes russes émotionnelles : je n’avais plus mes fidèles « amis » pour me garder dépressif.
Cependant, j’ai commencé à mettre en pratique les Douze Étapes avec un nouveau parrain. Je me suis engagé dans le service aux niveaux du groupe, de l’intergroupe et de la région ; et ma vie s’est améliorée, même s’il m’arrivait encore de connaître des périodes euphoriques suivies de brusques effondrements. Après trois ans et demi de sobriété, j’ai entendu certains membres des AA qui décrivaient les médicaments antidépressifs comme des béquilles, voire des entraves à la croissance spirituelle. J’étais convaincu d’être un alcoolique, mais étais-je fou ? Je n’avais jamais cessé de prendre mes médicaments durant mes années de sobriété, alors j’ai décidé, tout seul, que ces types avaient raison. Puisque mon problème était purement alcoolique, j’ai cessé de prendre mes médicaments.
Un mois a passé, et je me sentais en pleine forme ; un autre mois, et j’allais encore mieux. Le troisième mois, j’avais des ailes et faisais toutes sortes d’activités de service chez les AA. Puis, un jour, je me suis mis à halluciner. Effrayé, j’ai appelé mon parrain, qui m’a aidé à entrer dans un hôpital psychiatrique. J’avais évité l’hospitalisation durant toutes les années où j’avais bu, et voilà maintenant que « Monsieur AA » était fou à lier.
J’ai chaviré brusquement dans la pire dépression depuis que j’étais abstinent. Après 10 jours, j’ai reçu mon congé de l’aile psychiatrique, mais j’avais l’impression que ma vie était finie. Je n’avais presque plus d’intérêt pour les AA, Dieu, mon parrain, ni quoi que ce soit de positif. Après deux semaines, j’ai pris une surdose de lithium et j’en serais mort n’eut été une intervention médicale musclée. De toute évidence, Dieu n’en avait pas encore fini avec moi.
Une fois sorti des soins intensifs, je suis retourné à l’aile psychiatrique où l’on m’a placé dans une chambre d’observation. Là, je me suis mis à genoux et j’ai confié ma vie et ma volonté — et ma mort — aux soins de Dieu. Un sentiment de paix m’a envahi. Depuis ce jour, je pratique la Troisième Étape quotidiennement.
À l’hôpital, une soi-disant « vieille dure » a fait une Douzième Étape avec moi. Elle m’a planté le Gros Livre dans les côtes en disant : « Tiens, lis ça. » Quand j’ai répondu amèrement que je l’avais déjà lu, elle a jappé : « Eh bien, relis-le ! On voit bien que t’as dû manquer quelque chose. »
Assis à la table de sa cuisine, ainsi a commencé un cheminement plus profond à travers les Douze Étapes, et ma dépression a disparu. Consulter un thérapeute et prendre mes médicaments exactement tels que prescrits furent essentiels à mon rétablissement. Je n’écoute plus les alcooliques bien intentionnés qui jouent les médecins. Dans le chapitre du Gros Livre intitulé L’opinion d’un médecin, il est écrit : « On rencontre également le style maniaco-dépressif, qui est peut-être le moins compris par ses amis et sur qui on pourrait écrire tout un chapitre. »
Je crois que je ne peux pas avoir la sobriété sans une bonne santé mentale, pas plus que je ne peux avoir une bonne santé mentale si je bois.
Aujourd’hui, je jouis d’une excellente santé mentale, émotionnelle et spirituelle. Dieu m’a permis de redonner, comme les AA l’enseignent, en travaillant durant un an dans ce même hôpital psychiatrique, en offrant mes services bénévoles pour des centaines de réunions dans notre hôpital d’État et en siégeant au conseil consultatif du Comté en matière de santé mentale. Et, ce qui est le plus important, j’ai l’occasion de partager mon expérience, ma force et mon espoir avec d’autres membres des AA atteints d’une maladie mentale, en parlant avec eux le langage du cœur.
« Parce que je suis très fragile mentalement et émotionnellement, je ne peux pas me permettre de me reposer sur mes lauriers. »
Je m’appelle Cathy et je suis une alcoolique. On a aussi diagnostiqué chez moi un autre trouble de santé mentale en plus de l’alcoolisme.
J’ai connu l’alcool très tôt dans la vie et je buvais déjà régulièrement à l’âge de 13 ans. L’obsession mentale et la dépendance physique étaient là dès le début, et l’alcool est vite devenu la chose la plus importante dans ma vie. Tout ce que je faisais — toutes les décisions que je prenais — tournait autour de l’alcool. J’ai vite perdu la maîtrise de ma vie et, à 26 ans, j’ai atteint le bas-fond. Heureusement, un membre de ma famille m’a initiée aux AA en faisant une Douzième Étape avec moi.
D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours souffert de dépression. Après sept ans de sobriété, j’assistais encore à des réunions, je pratiquais les Étapes et j’utilisais ma marraine, j’étais moi-même marraine et j’assumais des tâches. J’avais une solide relation avec ma puissance supérieure et je priais constamment. Malgré tout cela, je vivais encore des sautes d’humeur extrêmes, des dépressions suicidaires et des épisodes de psychose paranoïaque.
J’ai eu la chance d’avoir des femmes stables dans ma vie, y compris ma marraine qui m’a encouragée, avec amour et sans aucun jugement, à chercher de l’aide extérieure. Même le Gros Livre nous encourage à le faire, à la page 151 : « Dieu a généreusement pourvu ce monde de bons médecins, psychologues et spécialistes de toutes sortes. N’hésitez pas à confier vos problèmes de santé à ces professionnels. »
Un membre des AA m’a présenté un excellent psychiatre qui comprenait la prédisposition aux dépendances de l’alcoolique, et celui-ci a diagnostiqué chez moi un trouble bipolaire. Au début, je résistais : je ne voulais pas prendre mes médicaments parce que mon ego me disait que je devrais pouvoir m’en sortir toute seule. Mais l’expérience m’avait clairement appris le contraire. Après avoir essayé un bon nombre de médicaments psychiatriques qui ne créaient pas de dépendance, nous avons finalement déterminé qu’une petite dose d’anticonvulsants suffisait à gérer mes symptômes. Cette médication m’a fait assez de bien pour me permettre de tirer profit du programme des AA. C’était il y a environ 19 ans et, par la grâce de Dieu et la fraternité des Alcooliques anonymes, je suis encore abstinente aujourd’hui.
Bien qu’occasionnellement ma santé mentale me cause des difficultés, je mène une vie fantastique aujourd’hui. Je suis utile, active et raisonnablement heureuse, joyeuse et libre. Je peux dire avec un certain degré de certitude que si je n’avais pas reçu de l’aide extérieure pour traiter mon trouble bipolaire, mes enfants auraient eu deux parents alcooliques suicidés au lieu d’un. Je peux dire la même chose des AA. Je suis certaine que je n’aurais pas survécu si je n’avais pas continué à considérer comme mon but premier de rester abstinente et d’aider un autre alcoolique.
Aujourd’hui, je suis reconnaissante d’avoir eu ces problèmes de santé mentale. Je constate non seulement qu’ils m’ont aidée à atteindre le bas-fond plus vite, mais qu’ils m’ont aussi empêchée d’errer par excès de confiance. Parce que je suis très fragile mentalement et émotionnellement, je ne peux pas me permettre de me reposer sur mes lauriers. Ma propre expérience de bipolaire me donne la chance de comprendre d’autres personnes qui souffrent d’une maladie mentale en plus de l’alcoolisme — encore un exemple qui montre que notre noir passé peut devenir notre plus grand atout. Aujourd’hui je parraine quelqu’un qui a des sautes d’humeur extrêmes, et c’est une source d’inspiration extraordinaire de la voir persévérer et ne reculer devant rien pour explorer toutes les voies de rétablissement. Cela dit, il n’est pas nécessaire d’avoir soi-même vécu avec la maladie mentale pour parrainer quelqu’un qui en est atteint. Nous transmettons le message des AA ; nous ne sommes ni médecins ni thérapeutes.
Il y a encore certains alcooliques qui pensent que vous n’êtes pas abstinent si vous prenez des antidépresseurs ou d’autres médicaments. J’encourage fortement ces personnes à lire la brochure intitulée « Le membre des AA face à la médication et autres drogues », qui stipule que certains alcooliques ont besoin de médication.
Je sais d’expérience que plusieurs membres des AA tiennent ceux qui ont une maladie mentale à distance. J’ai été témoin d’intolérance dans les réunions envers les membres atteints d’une maladie mentale. Je crois que cela découle principalement de la peur. Dans la Troisième Tradition, à la page 161 du livre Les Douze Étapes et les Douze Traditions, il est question de cette peur et de cette intolérance : « Oui, nous étions intolérants. (…) Comment pouvions-nous savoir que des milliers de ces gens que nous redoutions parfois connaîtraient un incroyable relèvement et deviendraient nos meilleurs collaborateurs et nos amis les plus intimes ? »
Au chapitre cinq, le Gros Livre dit : « Il y a aussi ceux qui souffrent de graves désordres émotifs et mentaux ; mais plusieurs d’entre eux se rétablissent s’ils sont capables d’honnêteté. » Nous pouvons nous rétablir et nous nous rétablissons. Nous avons seulement besoin de l’amour, du soutien et de la compassion de nos frères et sœurs des AA, et parfois peut-être d’un peu de patience et de tolérance supplémentaires.
« Si je continue de m’impliquer dans les AA et si je prends soin de ma santé mentale, je m’épanouis spirituellement, personnellement et professionnellement. »
« Les gens normaux n’agissent pas comme ça. » Voilà ce que je pensais en m’éveillant dans une chambre d’hôtel miteuse d’un État voisin. J’avais roulé seul durant quatre heures la nuit précédente pour arriver là. Je l’avais fait sous l’influence de l’alcool, bien entendu, mais avec l’aide également de l’énergie maniaque de l’un des épisodes les plus extrêmes que j’aie jamais connus. Oui, je suis l’un des millions de Nord-Américains qui souffrent de troubles de l’humeur, et comme environ un quart de mes frères et sœurs bipolaires, j’abuse de l’alcool comme si j’étais payé pour le faire. Or, durant ces dernières années, j’ai appris que si je ne me faisais pas traiter, je risquais de devenir une bien plus triste statistique.
J’ai été diagnostiqué trois ans avant de mettre le pied dans une salle de réunion des AA. Chaque fois que ma passion pour la bouteille se mettait à interférer avec ma vie, les médecins me suggéraient d’essayer le programme ou à tout le moins de réduire ma consommation d’alcool. Mais j’avais d’autres idées en tête. Je me disais : « Je vais déjà voir un psychiatre une fois par mois, je vide mon sac chez un thérapeute trois fois par semaine et je prends mes médicaments. Je fais déjà assez de travail. Et puis, mon problème n’est pas l’alcool, c’est le trouble de l’humeur qui détruit ma vie. »
Pendant ce temps, je n’étais pas stable du tout ; je buvais tous les jours et souvent en solitaire. Je ne m’en rendais pas compte à l’époque, mais l’alcool interagissait dangereusement avec mon trouble de l’humeur. Si je me sentais déjà dépressif, une bouteille de scotch me plongeait dans un océan de pensées suicidaires. Mais si j’étais dans un état d’exaltation et d’euphorie explosive, me saouler équivalait à verser de l’essence sur ma manie et me rendait encore plus coléreux, plus insouciant et, en règle générale, faisait de moi quelqu’un de pas très agréable à fréquenter. Et on aurait dit que si je n’étais pas déjà euphorique ou dépressif, l’alcool me poussait d’un côté ou de l’autre. Ce n’est que plus tard que je me suis aperçu que cette prise de substance indépendante effaçait les effets salutaires des médicaments que je prenais.
Par-dessus tout, j’étais malade spirituellement. Je pensais que j’étais Dieu (parfois littéralement) et que la personne la plus importante au monde, c’était moi. Mon instabilité et ma dépendance à l’alcool me séparaient du reste du monde et de toute puissance supérieure à moi-même.
Mais quand je suis enfin sorti de cette chambre d’hôtel pour aller assister à une réunion, j’ai compris ce qui m’avait manqué toute ma vie. Depuis le jour où j’ai posé mes fesses sur une chaise jusqu’à aujourd’hui, je ne me suis jamais senti autrement que bien accueilli par mes frères et sœurs dans le programme. Personne ne m’a jamais dit que j’étais dégoûtant, méchant ou fou — choses que je croyais être devenu. J’ai trouvé une puissance supérieure à moi-même, et je l’ai trouvée dans cet immense réseau d’alcooliques qui m’a appris l’importance du service et de m’occuper d’abord de mes affaires. Oui, pour moi, le mot G.O.D. (Dieu) signifie encore souvent Group Of Drunks (groupe d’ivrognes).
Il n’est pas surprenant que ma médication ait commencé à fonctionner et que je sois devenu plus stable quand j’ai arrêté de boire. Mais cela joue dans les deux sens : je dois rester abstinent pour rester stable, mais je dois aussi rester stable pour solidifier mon abstinence. Les promesses n’ont pas commencé à se réaliser pour moi tant que je ne me suis pas absorbé dans les Douze Étapes avec l’aide d’un parrain et tant que je ne me suis pas instruit sur mon trouble de l’humeur. Mon rétablissement dépend des réunions, du service et de la fraternité, mais il est aussi vrai qu’il ne durera pas si je ne poursuis pas ma thérapie ou si je cesse de prendre mes médicaments tels que prescrits par mon psychiatre. Il y a eut des périodes durant mes années de sobriété où je me suis reposé sur une chose en laissant l’autre de côté, et les résultats n’étaient pas très jolis. D’un autre côté, si je continue de m’impliquer dans les AA et si je prends soin de ma santé mentale, je m’épanouis spirituellement, personnellement et professionnellement.
La seule façon de rester stable, c’est d’essayer de garder l’équilibre parmi les choses qu’on peut contrôler tout en priant pour être guidé dans celles qu’on ne peut pas. Le fait est que l’alcool n’est pas un problème pour moi aujourd’hui, pas plus que mon trouble de l’humeur. Mon problème, c’est le chaos. J’y suis accro, probablement parce que j’en ai une si longue habitude : après tout, j’ai passé les 23 premières années de ma vie à faire des trucs comme me réveiller dans un autre État. Mais dans ce court laps de temps depuis que j’ai commencé à prendre soin de moi, il y a des moments où j’ai vu la lumière de l’Esprit. Et je n’exagère pas quand je dis que ces moments m’ont sauvé la vie. Je persiste à revenir parce que je sais que ma vie en dépend.
« Je peux être heureuse, joyeuse et libre même avec une maladie mentale. »
Je vis avec une maladie mentale invalidante. Je vis aussi avec l’alcoolisme. Je suis en rétablissement dans les deux cas, mais je ne serai jamais guérie ni dans l’un ni dans l’autre. Je traite mon alcoolisme avec les Alcooliques anonymes. Je traite ma maladie mentale en suivant une thérapie et en prenant des médicaments. Il m’a fallu beaucoup de temps pour arriver à faire cette distinction et m’en accommoder.
L’alcool m’a sauvé la vie quand j’étais jeune. Je viens d’une famille où l’alcoolisme et la folie régnaient. Vivant dans l’angoisse depuis ma tendre enfance, j’ai souvent pensé à mourir. Apprendre à boire fut un grand soulagement pour moi. Je n’ai pas cessé de penser à mourir, mais l’alcool m’apportait parfois des moments de véritable paix.
À l’université, j’ai consulté une thérapeute. Cette démarche m’a menée aux AA et j’ai cessé de boire. En quelques mois, je me suis retrouvée plongée dans une dépression incontrôlable. J’ai fait une tentative de suicide.
De nombreux alcooliques ont pensé à mettre fin à leurs jours. Nous avons parfois honte de ces pensées. Rien ne sert de juger notre façon de penser. Il m’a fallu apprendre à persévérer malgré tout. Avec le temps, une pensée plus saine rattrape un comportement plus sain. Parfois aussi les alcooliques disent qu’ils n’ont pas eu assez de courage pour se suicider, même quand ils le voulaient. Ma propre expérience m’a appris que le suicide n’est pas un acte de courage. C’est un acte de pur désespoir. Aujourd’hui, je suis heureuse de ne pas avoir réussi.
Après avoir traité ma dépression, il a fallu des années avant qu’on diagnostique chez moi un trouble mental plus profond et plus troublant. Il m’a fallu encore des années par la suite pour commencer à composer avec ce diagnostic. Le déni est un symptôme de plusieurs maladies en plus de l’alcoolisme. J’ai passé beaucoup de temps à prétendre que mon diagnostic n’était pas ce qu’il était. Mais je continuais de venir chez les AA.
Au fil du temps, le Mouvement m’a appris à m’accepter moi-même. Quand je l’ai fait, les portes de la liberté se sont ouvertes. J’ai accepté la réalité de mon diagnostic. Mon rétablissement de l’alcoolisme n’en n’a été que renforcé. J’ai enfin laissé le mode de vie des AA agir dans ma vie sans aucune réserve.
Les Alcooliques anonymes ont fini par m’enseigner à changer mes comportements et mes attitudes, mais le langage que nous utilisons chez les AA peut parfois poser des problèmes. Prenez, par exemple, la Deuxième Étape. L’idée même qu’on me « rende la raison » était déroutante et irritante pour moi, jusqu’à ce que j’accepte finalement que la pratique des Douze Étapes n’allait pas guérir ma maladie mentale. C’est que la maladie mentale n’est pas un défaut. Elle n’est pas de nature spirituelle. « Être sain d’esprit », tel qu’on le décrit dans Les Douze Étapes et les Douze Traditions, c’est surtout en arriver à prendre de saines décisions. J’ai appris à maîtriser mon impulsivité et à demander chaque jour l’aide de Dieu. Confier ma vie et ma volonté à une puissance supérieure dans la Troisième Étape ne guérit pas ma maladie mentale, mais cela me donne la force et l’espoir de lui faire face à la lumière de la sollicitude divine.
J’avais aussi de la difficulté avec la Quatrième et la Cinquième Étapes. L’un des symptômes de ma maladie est que je n’ai presque plus du tout de mémoire. Il y a bien des choses que mon esprit peut faire, mais se souvenir n’en est pas une. Il m’a donc été très difficile de compléter ma Quatrième Étape. Après avoir fait ma Cinquième Étape, j’avais l’impression d’être un imposteur chez les AA, parce qu’elle était tellement criblée de trous. Puisque je ne peux littéralement pas me souvenir de la plupart des choses qui sont arrivées dans ma vie, mes tentatives de procéder à un inventaire moral approfondi se sont avérées futiles et incomplètes.
Dixième Étape à la rescousse ! Quand je dresse un inventaire écrit et fais chaque jour table rase, il importe peu que je me souvienne ou non. Je vais bien, un jour à la fois, quand je dis la vérité aujourd’hui et que j’admets mes torts sans tarder.
Mon message d’espoir est qu’il est possible de se rétablir de ces deux maladies, même si on n’en guérit pas. Je peux être heureuse, joyeuse et libre, même avec une maladie mentale. Ma maladie mentale a un impact inimaginable sur ma qualité de vie et sur mon rétablissement de l’alcoolisme. Je gère les deux troubles, parce que c’est une question de vie ou de mort pour moi. Aujourd’hui, je choisis de vivre.
« Je relève des défis et je constate que mon humeur se stabilise et s’apaise graduellement. »
« Je ne sais pas encore avec certitude dans quelle mesure vos sautes d’humeur ont été causées par votre consommation abusive d’alcool et de drogues », a dit ma thérapeute tandis que le psychiatre avec qui elle travaillait quittait la pièce pour faire une photocopie de ma dernière ordonnance. Ces mots fendirent l’air comme un couteau ; étonnamment, ils laissèrent filtrer un mince rayon d’espoir et de lumière.
C’était en 2010 et j’avais fini par accepter le verdict médical selon lequel je souffrais d’un trouble bipolaire. La pile de preuves symptomatiques était tellement haute qu’on ne pouvait plus nier que quelque clochait sérieusement : de violentes sautes d’humeurs, des comportements irrationnels et des dépenses extravagantes m’avaient déjà coûté des relations, fait perdre des emplois et même évincer d’un appartement. Et pourtant, le véritable secret de Polichinelle, ce n’était pas la maladie mentale, c’était l’addiction.
« Chaque fois que vous avez perdu la maîtrise de votre vie, c’était sous l’influence de l’alcool ou de la marijuana », ajouta-t-elle. Il s’ensuivait que la seule façon de vraiment savoir d’où venait le problème était de m’abstenir de toute substance susceptible d’altérer l’humeur.
J’aimerais pouvoir vous dire que ma thérapeute m’a ensuite conseillé d’aller immédiatement chez les AA. Mon cheminement aurait peut-être suivi une route plus directe, mais ça n’a pas été le cas. Je ne lui en tiens pas rigueur, pas plus que je ne la considère comme responsable des nombreuses horreurs qui eurent lieu durant les quatre années suivantes, avant que j’arrive au Mouvement. Comme on dit, le rétablissement prend le temps qu’il prend — et, de toute évidence, j’avais encore bien des choses à découvrir par moi-même avant de pouvoir faire face à mon alcoolisme.
Ce n’est pas non plus la seule personne qui ait négligé de me recommander les AA. Durant ces quatre années, parmi la demi-douzaine de professionnels de la santé que j’ai consultés, pas un n’a suggéré que j’aille jeter un œil chez les AA. C’est une chose à laquelle je pense souvent. Serait-ce que l’alcoolisme est encore plus difficile à diagnostiquer qu’un trouble de santé mentale comme la bipolarité ? Ou ai-je moi-même embelli la vérité en minimisant la fréquence et la sévérité de ma consommation ? Les alcooliques sont reconnus pour être de bons menteurs qui ont d’innombrables secrets. Quelque chose en moi tenait à ce que je taise ce besoin désespéré de tomber dans l’oubli à ceux-là même qui auraient pu me guider et m’aider.
Le résultat de mon combat était commun et prévisible. Aussi longtemps que j’ai présenté mon problème sous le seul aspect de la maladie mentale, mon alcoolisme est resté intact, comme un passager clandestin sur le fragile navire de ma vie. Depuis que je fréquente les AA, j’ai appris que si vous ne pratiquez pas et ne grandissez pas dans votre sobriété, ce n’est qu’une question de temps avant que vous rechutiez. Et c’est durant ces périodes que j’accumulais les preuves les plus nombreuses et les plus colorées que j’étais fou !
J’ai suivi des thérapies en groupe et en privé ; j’ai dévoré tout ce que je trouvais à lire sur le trouble bipolaire ; et j’ai pris consciencieusement tous les médicaments psychotropes prescrits par mon médecin. Pendant de longues périodes de temps, j’ai même réussi à me tenir loin de la bouteille et de l’herbe. Mais aussi loin que j’aie pu me rendre sur la voie du rétablissement en santé mentale, je sentais qu’il y avait toujours ces mêmes nuages noirs qui se profilaient juste au-delà de l’horizon. Je savais au fond de moi qu’il y avait un défi qui m’attendait, et que je ne pourrais pas relever. Et j’avais raison : ce défi s’appelle la vie ! Tôt ou tard des circonstances se présentaient qui me paraissaient insurmontables sans ce premier verre d’alcool, et alors tout s’effondrait autour de moi en un temps record.
J’ai découvert que l’alcoolisme et les troubles de santé mentale sont des problèmes distincts mais connexes qui doivent être considérés comme faisant partie du plus large éventail de la santé mentale. Mes actions quand j’étais sous l’influence des drogues ou de l’alcool étaient certainement empreintes de folie, mais grâce aux AA j’en suis venu à voir ces actions comme le résultat inévitable de ma façon de vivre, et non comme une définition de qui je suis.
En plus d’assister régulièrement aux réunions, je vois encore un thérapeute spécialisé dans les troubles concomitants de santé mentale une fois par mois, tout en surveillant ma santé rigoureusement sur tous les fronts. J’ai abandonné le sucre en même temps que toutes les substances qui altèrent l’humeur. Je fais de l’exercice physique chaque jour et je tiens un journal de sobriété. Je ne regrette pas mon long détour par les soins de santé mentale ; mais la solution à mon problème n’était pas entièrement là, tout simplement. J’ai découvert que les outils glanés en thérapie (la thérapie cognitivo-comportementale, entre autres) sont tout à fait compatibles avec le programme des AA. J’aborde ma deuxième année de sobriété et je crois que ce n’est pas une coïncidence si les symptômes que j’ai connus lorsque je buvais ou me droguais n’ont plus jamais reparu avec la même sévérité. Par un effort soutenu, je relève des défis et je constate que mon humeur se stabilise et s’apaise graduellement. Aujourd’hui, je me décrirais même comme un optimiste. Pour moi, c’est une preuve que le programme des AA marche, et c’est pourquoi je continue de le mettre en pratique.
Quand j’entends la Deuxième Étape : « Nous en sommes venus à croire qu’une puissance supérieure à nous-mêmes pouvait nous rendre la raison », je me sens toujours chez moi dans une réunion. Mais je ne m’attarde plus sur le passé ni sur mes erreurs. Je suis reconnaissant aux AA de ce programme, qui m’enseigne à vivre d’une manière différente, et je cultive une paix intérieure que je n’aurais jamais crue possible. Si je peux offrir un conseil à celui ou celle qui souffre présentement d’un problème de santé mentale, c’est d’être honnête avec vous-même au sujet de votre consommation d’alcool : ce pourrait bien être la clé pour enfin résoudre votre problème et mener une vie plus heureuse et plus enrichissante.
« Comme l’alcoolisme et les autres dépendances, la maladie mentale vous dit aussi que vous n’êtes pas malade. »
Quand je me suis engagée sur la voie du rétablissement de l’alcoolisme, j’étais loin de me douter de tout ce qui m’attendait. Ce jour fatidique, affligée d’une prodigieuse gueule de bois qui me rendait incapable d’aller travailler, j’ai lancé les bras en l’air en disant ces simples mots : « Mon Dieu, aide-moi ! » Et l’aide est venue immédiatement, aussi vite que l’éclair, sous la forme d’un seul mot : « alcoolique ». D’une manière ou d’une autre, la connaissance que j’avais de cette maladie est entrée dans mon esprit et s’y est logée pour toujours.
Quelques instants plus tard, j’ai appelé ma mère, qui avait cessé de boire une vingtaine d’années plus tôt. Je lui ai dit que je venais de me rendre compte que j’étais alcoolique. « Dieu merci ! » a-t-elle répondu. Alors, je lui ai demandé ce que je devais faire. Elle m’a dit, en des termes on ne peut plus clairs, d’aller chez les AA. Le lendemain soir, j’entrais dans l’un des nombreux sous-sols d’église et salles de réunions de Manhattan et je levais la main pour admettre que j’étais nouvelle.
Au fil des ans, j’ai appris que le rétablissement signifiait un chambardement total de presque tous les domaines de ma vie. Si cela ressemble à une hyperbole, il reste que c’est la seule façon d’exprimer les changements qui se sont produits depuis ce temps. L’un des plus importants de ces changements n’est pas une chose dont on discute ordinairement dans les salles de réunion : j’ai découvert que j’avais une maladie mentale. J’ai compris plus tard que boire de l’alcool était une façon pour moi de gérer la dépression clinique, maladie que j’ai traînée chez les AA sans en avoir la moindre idée jusqu’à ma dixième année de sobriété.
Rétrospectivement, je vois bien que je n’étais pas un cas normal de rétablissement chez les AA, si tant est qu’un tel cas existe. Nous arrivons tous au programme avec notre propre amalgame de mécanismes de défense et de schémas destructeurs. Convaincue d’être unique, je n’étais pas quelqu’un de facile à parrainer. Mon téléphone pesait une demi-tonne et je le soulevais rarement. Je ne faisais pas confiance aux gens, surtout aux femmes, et j’avais très peu d’amis.
Chez les AA, je choisissais mes amis en fonction de ce que je percevais comme leur intelligence, et non selon leur détermination à poursuivre le programme. Je n’aimais pas ce qui ressemblait chez les AA à une sorte de dogme religieux. J’avais été élevée chez les Unitariens universalistes, qui ne prônent aucune doctrine particulière au-delà du principe que Dieu est amour. Durant ces premiers mois de rétablissement à New York, j’ai eu bien du mal à rester sobre. Quand j’ai finalement réussi à accumuler un peu de temps, un thérapeute a approuvé mon projet impulsif de déménager en Floride du Sud. Je m’étais enfin rendu compte que je souffrais d’un trouble affectif saisonnier (TAS) et que je détestais les rudes hivers newyorkais.
Environ sept ans plus tard, je ne comprenais pas pourquoi, malgré le fait que j’avais trouvé une solide marraine, que j’avais suivi toutes les Étapes dans l’ordre, que j’assistais régulièrement aux réunions des AA et que je faisais du service, j’étais encore malheureuse comme les pierres. Contrairement à presque tout le monde, je détestais les vendredis et j’adorais les lundis. Je me sentais mieux durant la semaine quand le travail m’occupait ; mais laissée à moi-même durant la fin de semaine, je passais mon temps à dormir et je me sentais perdue dans une sorte de néant. Je dormais, mangeais, regardais la télé. Je me suis aperçue que c’est un schéma que j’avais développé plus tôt dans ma vie.
Ma mère m’a convaincue de voir une thérapeute. Il faut croire que ça marchait, puisqu’en sortant de son bureau, après chaque séance, je pleurais comme une madeleine jusqu’à ma voiture. Mon nouveau mantra était : « Pas de croissance sans souffrance. » Pendant un an et demi, ma thérapeute m’a pressée d’aller consulter un psychiatre pour obtenir un véritable diagnostic. Elle était convaincue que je souffrais de dépression majeure. Mais je refusais en répliquant : « Pourquoi ? Je vais très bien ! » Ce que j’ignorais, c’est que, comme l’alcoolisme et les autres dépendances, la maladie mentale vous dit aussi que vous n’êtes pas malade.
Finalement, j’ai passé trois séances chez le psychiatre à pleurer, lequel m’a prescrit des médicaments qui, étonnamment, fonctionnent encore aujourd’hui. Il m’a expliqué que les médicaments pour le genre de maladie mentale que j’avais n’étaient pas conçus pour changer l’humeur. Les antidépresseurs, dit-il, sont censés rétablir l’équilibre chimique du cerveau qui donne accès à toute la gamme des émotions — colère, tristesse, peur, et toutes les permutations possibles. Et c’est bel et bien ce qu’ils font.
Je célèbre ce mois-ci mes 21 ans de sobriété continue. (J’ai fait une rechute d’un été, qui a fini de me convaincre.) Durant toutes ces années, j’ai assisté à une réunion pour personnes ayant un double diagnostic : maladie mentale et alcoolisme. Je n’aurais pas pu demeurer abstinente sans cela.
« Clarté d’esprit et pouvoir guérisseur ont fourni les dernières pièces de mon casse-tête spirituel, mental et émotionnel. »
J’avais probablement cinq ou six ans de sobriété quand rien de moins qu’une avalanche spirituelle et mentale s’est abattue sur moi. Ce fut une période très difficile à comprendre et à naviguer, puisque je ne croyais pas être un cas d’ivresse mentale. Je mettais réellement les Étapes en pratique, j’avais un parrain, des filleuls, j’étais suivi par un thérapeute à l’extérieur des AA, je faisais du service, j’avais un groupe d’attache et j’étais chaque jour en contact conscient avec ma Puissance supérieure. Je me suis demandé je ne sais combien de fois : Qu’est-ce que je ne fais pas ? Qu’est-ce que je pourrais faire de plus ?
Mon parrain et d’autres m’ont rassuré : j’acceptais et suivais toutes les suggestions ; il suffisait donc de persévérer, un jour à la fois. Or, j’étais aux prises avec un problème de santé mentale sans même le savoir. Je faisais l’expérience d’un bombardement de pensées horribles, terrifiantes et obsédantes dirigées contre autrui d’une manière qui ne m’était pas familière et que je ne considérais pas du tout comme normale. Ces pensées surgissaient le plus souvent auprès et à l’endroit des personnes et des choses qui m’étaient les plus chères au monde. J’étais de plus en plus déboussolé — en pleine abstinence.
Pendant ce temps, je me sentais bloqué, isolé et plus seul que jamais dans le programme des Alcooliques anonymes parce que je ne pouvais pas parler de ces choses durant les réunions, de peur surtout qu’on me fasse enfermer ou que les gens commencent à me fuir. Rien ne fonctionnait pour moi contre ces pensées paralysantes, terrifiantes et compulsives. Je pensais qu’il se pouvait très bien que je sois « fou » et je me disais que je serais peut-être plus en sécurité enfermé quelque part. C’est dire à quel point j’étais effrayé.
Un jour, par la grâce de Dieu, je me suis confié à un ami de mon groupe d’attache dont je me souvenais qu’il avait déjà avoué avoir des problèmes similaires. Il m’a suggéré un livre qui l’avait beaucoup aidé concernant le type de pensées que j’éprouvais. Le lendemain je me suis rendu en courant à librairie la plus proche, me suis assis par terre et me suis mis à lire. Il y avait tout un chapitre qui traitait exactement de ce que je ressentais, et plus encore.
Comme le Gros Livre des Alcooliques anonymes, ce livre avait une section consacrée aux témoignages. Je dis souvent que c’est vraiment comme si le ciel s’était ouvert tout à coup et m’avait souri. J’ai appris que ce que j’étais en train de vivre dans l’abstinence était un parfait exemple de trouble obsessif compulsif (TOC). Les pensées terribles, plus que terrifiantes, et les compulsions que j’éprouvais avaient un nom ! Le livre disait que les personnes qui souffraient de ce genre de pensées et compulsions étaient des gens qui ne passaient pas à l’acte. C’était un doute que j’avais toujours en tête, alors d’entendre cela a changé ma vie, pour dire le moins. Je n’étais pas « fou ». Avec un peu d’aide additionnelle de mon thérapeute, j’ai compris que c’était simplement une maladie mentale.
Inutile de dire que j’ai tout de suite cherché la liste des groupes de soutien fondés sur les Douze Étapes pour les personnes atteintes de TOC. J’en ai trouvé quelques-uns et, dès ma première réunion, quelqu’un a raconté avoir exactement les mêmes pensées que moi. Après son partage, tout le monde a éclaté de rire. Ouf ! Rires, identification et une solution. Maintenant j’étais tout à fait chez moi.
Au fil des ans, clarté d’esprit et pouvoir guérisseur ont fourni les dernières pièces de mon casse-tête spirituel, mental et émotionnel. Il est écrit dans nos publications que les AA n’ont pas toutes les réponses et qu’il est parfois nécessaire de chercher de l’aide extérieure. Pour moi, cela a été une grande source de guérison et de force.
Un jour à la fois, ce trouble devient plus facile à comprendre, à accepter et à gérer. En gardant simplement l’esprit ouvert, en faisant bon accueil aux suggestions et en suivant le programme, j’ai vu les portes de la liberté s’ouvrir devant moi. Si nous mettons toujours un pas devant l’autre, dans les bras de notre puissance supérieure, nous trouverons le repos et la lumière ; nous comprendrons que nous ne sommes vraiment pas seuls et qu’il est certes possible d’aller bien, un jour à la fois.
« Aujourd’hui, je ne veux pas mourir et je ne veux pas boire. »
Quand je suis arrivée dans les salles des Alcooliques anonymes, j’avais envie de mourir. Le besoin de boire était implacable. Je ne voulais pas boire, il fallait que je boive. J’en étais au point où j’essayais d’ingérer le plus d’alcool possible aussi vite que possible.
Voyez-vous, je cherchais un soulagement à toutes les voix, tous les flash-back et toutes les émotions qui sont les symptômes du trouble de stress post-traumatique (TSPT) et du trouble dissociatif de l’identité (TDI). L’alcool m’a aidée pendant longtemps. Il me procurait ce soulagement. Mais plus mon alcoolisme progressait, plus le soulagement diminuait, et plus il créait, en fait, de nouveaux problèmes. J’avais franchi cette ligne invisible dont parle le Gros Livre.
Le thérapeute qui me suivait faisait tout ce qu’il fallait. Il ne m’a jamais demandé d’arrêter de boire. Au lieu de quoi, il me posait doucement des questions sur ma façon de boire, questions qui m’ont aidée à voir par moi-même que c’était un réel problème. Après un an, il avait suffisamment gagné ma confiance pour me poser la question la plus importante : « Penses-tu être une alcoolique ? »
Je ne voulais pas répondre à cette question ; c’est comme si j’avais su qu’en disant oui, il faudrait que j’arrête de boire. Mais il m’a dit que je n’avais pas à faire quoi que ce soit ; il m’a seulement suggéré d’assister à trois réunions des AA.
Pour devenir abstinente et le rester, il y a des difficultés supplémentaires quand on souffre du TDI. De nombreux alcooliques ont des trous de mémoire. Ils savent ce que c’est de boire et de ne pas se rappeler ce qu’ils ont fait. Très souvent, ils apprennent de quelqu’un d’autre qu’ils ont fait des choses qu’ils n’auraient jamais faites s’ils n’avaient pas bu. Il y a aussi des trous qui sont moins profonds, où l’on se souvient plus ou moins bien de quelques fragments de ce qui s’est produit. C’est à peu près ce qu’on ressent avec le TDI, et j’ai ce genre d’expériences même sans avoir bu. Ce phénomène s’appelle « switching » (ou passer d’une personnalité à l’autre) ce qui signifie qu’une autre partie de moi s’empare de mon corps.
Pendant un certain temps, l’alcool m’aidait à maîtriser ce phénomène. Mais de ne pas boire l’aggravait. J’en sortais tout apeurée, confuse et complètement désemparée. Comment pourrais-je demeurer abstinente si je ne pouvais pas rester présente ?
La première chose à faire fut d’être honnête avec ma marraine. Elle ne connaissait rien au TDI, mais cela ne l’a jamais effrayée. Elle a fait ce que font les bonnes marraines. Elle m’a accompagnée dans la lecture du Gros Livre et dans l’apprentissage des Douze Étapes. Il était important de traiter d’abord l’alcoolisme et de trouver les ressemblances. Il a fallu que nous fassions une sincère Quatrième Étape et que nous travaillions ensemble le mieux possible. Prendre immédiatement des tâches de service m’a aidée à me stabiliser et à créer un sentiment d’appartenance. Toutefois, cela n’a pas été facile. Mon alcoolisme et mon TDI me disaient que j’étais différente et que je n’étais pas à ma place.
J’ai dû travailler fort pendant plus de deux ans d’abstinence pour devenir plus présente et pour remarquer les changements qui s’opéraient dans ma vie. Je continue de travailler avec mon thérapeute. J’ai maintenant une marraine qui prend le temps de s’instruire sur le TDI et qui pose des questions qui nous sont utiles à toutes les deux.Elle comprend que cela fait partie de qui je suis et qu’il y a des raisons sous-jacentes. Nous travaillons ensemble, de concert avec la thérapie, à déterrer, découvrir et, avec le temps, mettre de côté. J’ai trouvé des moyens de partager dans les réunions sans avoir à parler de mon TDI. Il est important, toutefois, que j’en parle à quelques personnes, surtout dans mon groupe d’attache.
J’ai découvert qu’il y avait beaucoup de gens chez les AA qui souffrent du TDI et j’ai eu l’occasion de partager mes expériences avec certains d’entre eux. Je suis moi-même marraine, RSG de mon groupe d’attache, et je fais un tas de trucs que je n’aurais jamais crus possibles ! Aujourd’hui, je ne veux pas mourir et je ne veux pas boire. Les résultats de ce cheminement difficile en valaient bien la peine, et j’ai hâte de voir où va me mener mon prochain petit pas dans la bonne direction.
Le parrainage est un aspect important du programme des Alcooliques anonymes — un reflet de la manière même dont les AA ont été fondés : un alcoolique en aidant un autre. Chez les AA, parrain et filleul traitent d’égal à égal, tout comme nos co-fondateurs Bill W. et le Dr Bob. Essentiellement, le processus de parrainage revient à ceci : un alcoolique qui a fait quelque progrès dans le programme de rétablissement partage son expérience en continu et en tête à tête avec un autre alcoolique qui cherche à atteindre ou à maintenir son abstinence chez les AA.
Le parrainage d’un alcoolique atteint d’une maladie mentale ressemble au parrainage de tout autre alcoolique : il est essentiel de concentrer ses efforts sur l’abstinence et sur le programme des AA. Cependant, il peut y avoir des défis particuliers, qui concernent parfois la médication et l’aide professionnelle nécessaires pour traiter certains problèmes de santé mentale.
Suivent les témoignages de cinq membres des AA qui ont assumé cet important travail de parrainage et ont réussi à guider d’autres alcooliques, particulièrement ceux qui avaient des problèmes de santé mentale.
« Je l’encourage à progresser, à participer et à se mettre au service d’autrui. »
J’ai parrainé une dizaine d’alcooliques durant mes 10 années de sobriété. De ces 10 ou 12 hommes qui ont suivi un cheminement dont j’ai eu la chance d’être témoin, la moitié avait des difficultés intellectuelles ou des problèmes de santé mentale d’un ordre ou d’un autre, et certains avaient plus d’une de ces difficultés à la fois. Bien sûr, ce ne sont des « problèmes » et des « difficultés » que tant et aussi longtemps qu’ils restent ignorés et non traités. Mais lorsqu’on cesse de les ignorer et qu’on les aborde avec autant d’honnêteté, d’ouverture d’esprit et de bonne volonté que l’alcoolisme ou la dépendance, ces états de santé deviennent beaucoup plus faciles à gérer.
Je me tourne souvent vers des passages du Gros Livre des Alcooliques anonymes pour me rappeler et rappeler à mes filleuls que Bill W. et le Dr Bob reconnaissaient l’existence de ces défis supplémentaires et qu’ils encourageaient souvent les alcooliques rétablis ou en voie de rétablissement à obtenir de l’aide extérieure auprès d’un thérapeute ou d’un médecin. Les passages abondent dans nos publications où il est recommandé d’aller chercher de l’aide pour les troubles de santé mentale, et de prendre ses médicaments tels qu’ils sont prescrits par des médecins diplômés et qualifiés. Les médecins qui ont une formation en psychiatrie — comme le Dr Silkworth lui-même, l’un des premiers amis non-alcooliques des AA — sont les meilleurs experts pour nous conseiller et nous guider vers le traitement approprié. Les AA se sont établis comme une Société pour alcooliques rétablis, et notre livre est un texte qui décrit précisément comment nous nous sommes rétablis de ce qui semblait être un état physique et mental désespéré. Les AA, tels que je les comprends, n’étaient pas et ne constituent toujours pas aujourd’hui une forme exclusive de traitement de l’alcoolisme, des dépendances et des maladies psychiatriques.
Graduellement, je remarque une plus grande tolérance dans nos réunions quand on parle ouvertement de « ce que c’est maintenant » d’être abstinent tout en apprenant à vivre avec un trouble de l’anxiété, un trouble bipolaire ou même un trouble schizo-affectif. Ces problèmes — ignorés et non traités — se marient très bien avec un verre ou une drogue de rue pour calmer les nerfs, les voix et les sautes d’humeur quand les gens ne veulent pas y faire face. Je me demande combien de rechutes, de morts par overdose et de suicides sont attribuables à des troubles de santé mentale purs et simples qui minent et sabotent les efforts pour devenir et rester abstinent ? La science nous dit que les troubles de santé mentale et l’alcoolisme sont concomitants la plupart du temps. Les chercheurs estiment que plus de 85 pour cent des alcooliques et des toxicomanes pourraient et devraient recevoir un double diagnostic.
Le Gros Livre nous dit clairement que nous avions perdu la raison et qu’on pourrait la retrouver. Il nous dit, de maintes manières, que l’alcoolisme est une maladie tripartite, qui touche le mental (pensées et émotions), le corps et le Grand Esprit qui nous habite tous. C’est une maladie holistique, tout comme le sont le programme et la solution. Ce qui est « holistique » n’est pas exclusif, mais inclusif. Cela m’a apporté une grande paix il y a dix ans, et c’est encore le cas aujourd’hui.
En tant que parrain, ma première responsabilité est de guider l’alcoolique, qui place sa confiance en moi, dans la lecture du Gros Livre et la pratique des Douze Étapes. Deuxièmement, je soutiens cette personne dans son cheminement, je l’accompagne dans les salles de réunion et lui présente d’autres membres qui lui ressemblent. Je lui offre des occasions fréquentes et régulières de parler, d’écouter et d’en apprendre toujours davantage sur sa maladie et sur notre Société. Je l’encourage à progresser, à participer et à se mettre au service d’autrui. Je l’aide à entrevoir la Vérité et à percer le voile de ses propres illusions et tromperies. Je l’encourage à concevoir et à entrer en relation avec sa Puissance supérieure.
De temps en temps, un filleul me confie qu’il a reçu un diagnostic dans le passé ou qu’il éprouve présentement des symptômes dont l’un ou l’autre de nous deux peut déduire qu’ils sont compatibles avec un diagnostic de dépression majeure, de trouble de l’anxiété ou de trouble bipolaire, pour n’en nommer que quelques-uns.
Premièrement, ce n’est pas mon rôle ni ma responsabilité de diagnostiquer quoi que ce soit. Ce serait rendre un très mauvais et très dangereux service. Je n’ai pas la formation pour émettre ce genre d’opinions. Mais je peux lui suggérer de voir un médecin et de demander l’aide appropriée à l’expert approprié, de la même manière que j’enverrais un filleul à un comptable pour des conseils fiscaux. Je ne suis ni avocat, ni médecin, ni expert comptable.
Deuxièmement, en tenant pour acquis qu’il a rendu visite au spécialiste et qu’il a participé au développement de son propre plan de traitement, je l’encourage et le soutiens dans son cheminement en santé mentale comme chez les AA. Mes suggestions concernent sa responsabilité et son honnêteté, et non pas le contenu de sa psychothérapie. Mon seul et unique but est sa sobriété.
Troisièmement, mes suggestions et mon aide vont chercher jusqu’à un certain point à lui faire reconnaître et conscientiser les phénomènes qui déclenchent ses sautes d’humeur et autres symptômes. Je n’oublie pas que prévenir l’anxiété, c’est peut-être éviter une rechute par la même occasion. Par exemple, si mon filleul se plaint qu’il a des pensées suicidaires, je m’assure qu’il applique pleinement notre programme et je le dirige vers son prestataire de soins de santé professionnel. Je le tiens responsable. Cela dit, mon soutien se limite à ce qui reste pertinent à l’intérieur des Douze Étapes. Jamais je ne deviens psychologue, thérapeute ou médecin. Je soutiens sa relation avec ces professionnels de la même façon que je favorise sa relation avec ses amis des AA et avec sa Puissance supérieure. Rien de plus ni rien de moins.
Enfin, je suis la voix de la raison et de l’équité lorsque cette question fait surface dans une réunion ou dans le Mouvement. Quand j’entends des gens qui ridiculisent ou dénigrent les troubles de santé mentale ou les déficiences intellectuelles, je considère que ma responsabilité est d’appliquer les principes des Alcooliques anonymes dans tous les domaines de ma vie. L’honnêteté et l’intégrité de même que la tradition de préserver la santé et la vitalité de notre Société me poussent à répondre au mépris, au ridicule et à la stigmatisation en suggérant respectueusement que la discrimination n’a pas sa place chez les AA. Notre Société accepte, accueille et aime tous les alcooliques pourvu qu’ils aient le désir d’arrêter de boire. Je ne pourrais pas plus rester silencieux si un schizophrène était dénigré ou marginalisé que si quelqu’un d’autre était victime de discrimination dans une réunion pour une question d’orientation sexuelle, de race, d’âge ou de sexe.
Par-dessus tout, je transmets un message d’espoir. Il y a de l’espoir dans le rétablissement de l’alcoolisme, de la toxicomanie et de la maladie mentale. Tous nos principes et nos nouvelles relations vous le diront !
« Je n’ai aucun remède, mais j’ai de l’expérience quand il s’agit de rester abstinente. »
Ma première filleule, Bonnie, était une professionnelle de la santé qui souffrait également d’une maladie mentale. Elle m’a demandé d’être sa marraine un soir après m’avoir entendue parler, et je sais qu’elle m’a demandé parce que j’étais une alcoolique et qu’elle en savait un peu plus sur ce que j’étais, ce qui m’était arrivé et comment j’étais maintenant.
De temps à autre, Bonnie se confiait à moi quand ses symptômes s’aggravaient — parfois elle avait peur des voix qui sortaient des prises de courant, par exemple. Elle savait que je n’avais aucune expérience des maladies mentales, mais elle sentait d’une manière ou d’une autre qu’elle pouvait tout me confier parce que nous avions l’alcoolisme en commun et que j’arrivais à me rétablir de l’alcoolisme en utilisant les principes éprouvés des AA.
Depuis ce temps, j’ai parrainé au moins sept alcooliques qui souffraient de maladie mentale ; et bien qu’elles m’aient toutes demandé d’être leur marraine chez les AA, la maladie mentale fait partie intégrante de notre relation. Certaines m’ont parlé de leur maladie à notre toute première rencontre ; avec d’autres, nous avons dû y faire face en cours de route. Quand une femme me demande d’être sa marraine, je lui propose de nous rencontrer pour en parler, juste pour savoir si nous avons bien la même idée du parrainage. Je leur dis que je considère le parrainage comme une tâche de service et qu’en tant que marraine, je suis à leur disposition. Je n’ai aucun remède, mais j’ai de l’expérience quand il s’agit de rester abstinente, et je suis prête à partager cette expérience aussi longtemps qu’elles le voudront.
Je parraine Gladys depuis très longtemps, et son comportement change considérablement selon son état de santé mentale. Elle me raconte ses difficultés avec les prestataires de soins de santé mentale et avec sa médication, qu’elle a cessé de prendre pour le moment — elle est passée d’un psychiatre à un shaman. Tout ce que je peux faire, c’est d’essayer de la ramener vers nos principes tout en lui suggérant de suivre les conseils du prestataire de soins de santé mentale qu’elle a engagé. De toute évidence, elle aime beaucoup les AA, elle est prête à se rendre utile et elle est appliquée dans l’apprentissage des Étapes, alors elle reste abstinente et elle en est reconnaissante.
Rhoda est une filleule de longue date. Quand elle m’a abordée, elle était en pleine crise de santé mentale, mais elle avait déjà quelques années de sobriété à son actif. Elle est bipolaire et a dû être hospitalisée, mais elle n’a jamais cessé d’être soignée depuis des années. C’est une très bonne employée qui a survécu à bien des remerciements dans sa compagnie et, encore aujourd’hui, elle est très engagée dans le travail de service chez les Alcooliques anonymes. Selon elle, si elle n’a jamais dévié de son plan de traitement médical, le mérite revient aux AA. En tant que marraine, je n’ai rien eu à faire que je n’aurais fait pour n’importe quelle autre filleule. Je suis là pour elle sans réserve, dans les bonnes et les mauvaises passes.
Jannine m’a demandé de prendre la relève lorsque sa marraine de longue date a déménagé dans un autre État. Elle avait réussi à maintenir sa sobriété et à passer au travers de plusieurs crises associées à ses propres graves problèmes de santé mentale comme à ceux de sa fille. Elle disparaît par moments et tout ce que je peux faire est de prier pour elle, mais lorsqu’elle revient nous travaillons les Étapes. Elle et moi nous sommes rencontrées pour étudier le mode de vie des AA dans plusieurs cadres différents, y compris l’hôpital, ma voiture, sa voiture, la cafétéria, chez moi, mon bureau, le parc, l’aile psychiatrique. Parfois elle n’y est que de corps mais parfois elle est entièrement présente ; or, je sais que je dois continuer d’être là pour elle.
Angie souffre de dépression et a des difficultés avec ses prestataires de soins de santé mentale. Elle a ses propres idées sur la médecine traditionnelle occidentale et sur les traitements alternatifs. En tant que marraine chez les AA, je n’ai aucune opinion là-dessus, mais je suis prête à l’écouter et à l’encourager à utiliser nos principes et à demander l’aide de Dieu pour être guidée. Nous travaillons les Étapes très, très lentement, mais nous progressons.
Toutes ces femmes ont différents symptômes de maladie mentale et des approches thérapeutiques différentes ; or, peu importe leur état mental, elles ont en commun le très grand désir de ne pas boire et sont prêtes à tout pour maintenir leur abstinence.
C’est un honneur pour moi d’être dans la vie de ces femmes et d’avoir leur confiance. Elles me montrent que la sobriété est possible peu importe ce qui nous afflige par ailleurs. Je fais confiance à ma Puissance supérieure et je suis prête à être là et à apprendre de ces femmes qui se tournent vers moi pour être aidées et pour recevoir gratuitement les outils de sobriété qui m’ont été donnés gratuitement.
« En tant que membres des AA, nous n’avons pas du tout à nous mêler des soins de santé que reçoivent d’autres membres des AA. »
Il y a quelques années, j’ai parrainé un homme qui avait cinq ans d’abstinence, un bon travail et une grosse maison. Sa merveilleuse épouse appartenait à une famille fabuleusement riche, connue à travers le pays, et ils venaient d’avoir un beau petit bébé. Un jour, il a garé sa voiture à la plage et il s’est tiré une balle dans la tête. J’ai découpé sa notice nécrologique dans le journal et l’ai attachée au poème « Richard Cory », d’Edward Arlington Robinson, avant de les distribuer à tout le monde dans notre groupe pour hommes. « Richard Cory » raconte l’histoire d’un homme riche, bien éduqué et bien élevé ; il est reconnu et admiré de tous dans la ville où il habite ; et puis, un soir, il met fin à ses jours.
Quand de nouveaux venus chez les AA me demandent de les parrainer, s’ils parlent de suicide ou semblent être désespérés, je leur demande s’ils ont accès à des armes à feu. Si la réponse est oui, je suggère qu’ils me confient leurs armes pendant un minimum de 90 jours et je les encourage fortement à obtenir une évaluation psychiatrique. Dans quelques cas, les hommes ont attendu un an avant de me demander leurs armes — après avoir travailler les Douze Étapes.
De nouveaux membres des AA, qui prennent des médicaments pour un trouble psychiatrique, me confient parfois que leurs parrains ou d’autres membres leur ont conseillé d’arrêter leur médication ou d’arrêter de voir leur thérapeute. Je leur dis de courir le plus vite possible dans la direction opposée, parce qu’en tant que membres des AA, nous n’avons pas du tout à nous mêler des soins de santé que reçoivent d’autres membres des AA. Des soins psychiatriques auraient probablement été salutaires à mon ami qui s’est suicidé. À la page 151, notre livre, Les Alcooliques anonymes, nous prévient : « nous ne devons jamais sous-estimer un bon médecin ou un bon psychiatre. Leurs services sont souvent indispensables dans le traitement d’un nouveau et le suivi de ce traitement. »
Un homme que j’ai parrainé recevait une allocation d’invalidité à cause d’un trouble bipolaire débilitant de type 1, dont il était affligé depuis longtemps. Pendant des années il avait vu un travailleur social psychiatrique au moins une fois par semaine, et il se demandait ce que j’en pensais. Je lui ai dit que je supposais que le travailleur social l’aiderait avec ses problèmes de santé mentale et que je l’aiderais à lire le Gros Livre et à faire les Douze Étapes. Il était soulagé de voir qu’il n’y avait pas de conflit entre les soins de santé mentale et les AA. Il m’a dit plus tard que le travailleur social était heureux de collaborer avec un parrain qui se concentrait sur les AA et n’essayait pas de jouer au thérapeute ou au psychiatre amateur.
Un autre homme que j’ai parrainé, abstinent depuis plusieurs années chez les AA, souffrait aussi d’un trouble bipolaire, et il est resté dans une aile psychiatrique pendant des semaines, le temps que son psychiatre ajuste sa médication. Aujourd’hui, tout en continuant d’être un membre actif et loyal des AA, il voit un psychiatre régulièrement, consulte un conseiller matrimonial avec son épouse et fait partie d’un groupe de soutien en rapport avec sa maladie mentale.
J’ai parrainé des gens qui avaient 30, 40 ou 50 ans de sobriété, et de temps à autre ils ont besoin de voir un psychologue ou un psychiatre pour des problèmes circonstanciels, des difficultés conjugales, la dépression, l’anxiété ou autres. Je les encourage à aller chercher cette aide, parce que les AA ne sont pas un remède universel pour tous les maux de la terre, et je sais que le stress associé à la dépression et à l’anxiété, lorsqu’il n’est pas traité, peut vous ramener à la bouteille.
« Nous sommes nombreux aux prises avec un problème de santé mentale. »
Je suis alcoolique. Je suis aussi bipolaire. Mon cheminement n’a pas été facile chez les AA, entre mon trouble bipolaire et mon alcoolisme, entre parler d’un problème à ma marraine ou en parler à mon médecin, entre plancher sur une Étape ou demander qu’on ajuste ma médication. Mon psychiatre sait que je suis une alcoolique en rétablissement chez les AA et quand je ne vais pas bien il lui arrive de me demander si j’ai parlé à ma marraine et si j’assiste à des réunions.
Je suis abstinente depuis 15 ans et je me demande encore ce qu’il convient de partager au niveau des réunions. Certaines personnes ne veulent pas du tout entendre parler de dépression, alors je parle rarement de cet aspect de ma vie au niveau du groupe. Mais j’ai des amies et d’autres membres à qui je peux me confier après les réunions. J’ai découvert que nous sommes nombreux aux prises avec un problème de santé mentale.
Dieu m’a envoyé des femmes à parrainer qui ont aussi divers problèmes de santé mentale, alors je comprends combien la chose peut être difficile pour ma marraine quand cette ligne de démarcation s’embrouille : Où s’arrête mon travail de marraine et quand dois-je leur suggérer de parler à leur médecin ? La réponse est : quand j’ai demandé l’aide de Dieu et que j’ai le sentiment d’avoir fait tout ce je pouvais relativement aux Étapes. Étant bipolaire, je crois qu’il est plus facile pour moi de parrainer ces femmes parce que nous avons ce lien qui nous unit et je sais ce que c’est quand elles ont besoin qu’on modifie leur médication.
La médication est une question importante pour moi, et c’est quelque chose dont je ne parle pas dans les réunions. J’ai eu des marraines qui m’ont dit que je n’avais pas besoin de médicaments pour soigner ma dépression, que j’avais juste besoin des Étapes. Pour quelqu’un qui est déprimé quelques jours par-ci par-là, c’est peut-être vrai. Mais pour quelqu’un comme moi, qui suis dépressive tous les jours de ma vie, c’est une question qu’il vaut mieux laisser aux professionnels. Je suis contente que les AA aient une brochure sur la médication et l’alcoolique parce que je suis les suggestions de cette brochure.
Je suis reconnaissante aux membres des Alcooliques anonymes qui ont partagé leur expérience de la dépression avec moi et j’espère que je pourrai aider un autre alcoolique aux prises avec la maladie mentale.
« Ces femmes m’ont montré ce que cela signifie de faire confiance à une puissance supérieure à soi-même. »
Après plus de 20 ans de consommation d’alcool et une dépression nerveuse, ce sont les questions lancinantes d’un thérapeute qui m’ont amenée chez les AA. Pour la première fois de ma vie, j’ai appris à écouter quelqu’un d’autre, sans le bavardage du comité interne dans ma tête pour noyer ses paroles.
Mes tendances obsessionnelles sont devenues mes meilleures alliées, puisque je n’ai pas assisté à 90 réunions en 90 jours, mais à près de 250 réunions durant mon premier été chez les AA.
Je n’avais pas aussitôt fait ma Cinquième Étape, après quelques mois de sobriété, que la voix de la folie me soufflait par-dessus l’épaule gauche : « Ce truc des AA, ça va peut-être te passer… »
Dieu merci, on m’a invitée à me joindre à un comité de service et à me rendre régulièrement dans un centre de traitement, avec mon histoire à raconter et avec d’autres femmes qui avaient aussi leurs histoires.
Même si je savais qu’il faut donner pour conserver sa sobriété, les occasions de parrainage se présentaient rarement.
Un jour, une femme m’a approchée. Nous n’avions en apparence rien en commun. Elle m’a demandé si je voulais être sa marraine. Me rappelant uniquement qu’on est toujours censé dire oui aux demandes des AA, je lui ai promis de l’accompagner dans l’apprentissage des Étapes. « Mais, hésita-t-elle… je suis bipolaire. » Elle m’a demandé d’y réfléchir avant de lui répondre.
J’ai parlé de sa requête à ma propre marraine, qui m’a simplement rappelé la Déclaration de Responsabilité. Elle m’a dit que mon instinct, qui avait été de répondre oui immédiatement, était juste.
Parrainer ma nouvelle filleule m’a demandé de la patience et de l’écoute ; il a fallu que je lui parle de moi et que j’admette que je ne savais pas tout, que je lui offre de l’espoir et l’encourage à employer des moyens thérapeutiques autres que les AA — en d’autres mots, c’était à peu près exactement comme parrainer n’importe quel autre alcoolique.
Au début, je croyais que les troubles bipolaires, les TOC ou même la schizophrénie étaient fort probablement les résultats de l’alcoolisme, plutôt que des problèmes séparés coïncidents. Je ne sais pas pourquoi j’avais cette croyance, mais c’était peut-être dû au fait qu’un de mes proches amis avait déjà reçu un diagnostic erroné de bipolarité ; on lui avait prescrit du lithium mais il avait guéri en embrassant le mode de vie des AA, laissant l’alcool et le lithium derrière lui. Quelles que soient les raisons de cette croyance, elle ne s’accorde pas avec mon expérience.
Grâce au bouche à oreille, j’ai continué à parrainer et à travailler les Étapes avec de nombreuses femmes schizophrènes ou bipolaires. Ces femmes m’ont montré ce que c’est que de faire confiance à une puissance supérieure à soi-même, et je ne peux qu’espérer pouvoir un jour les imiter. Elles ont atteint des buts d’apprentissage, décroché des boulots avec de plus en plus de responsabilités, renoué des liens familiaux, tout en continuant de rester abstinentes et en suivant les conseils psychiatriques de leurs médecins. Elles sont des exemples extraordinaires de sobriété, et elles sont mes amies.
Quant à moi, tant que je continue à prendre part aux difficultés, aux succès, aux revers et aux épreuves d’autres alcooliques, qu’ils souffrent ou non d’une maladie mentale, cette voix insistante qui me souffle « Tu n’as pas besoin des AA » reste tranquille et je ne l’entends pas, ce qui m’a permis de rester abstinente depuis plus de six ans.
Alors, quand quelqu’un quelque part tend la main en quête d’aide, je veux que ma main, en tant qu’alcoolique en rétablissement pratiquant le mode de vie des AA, soit toujours là.
Des sujets tels que la médication et la santé mentale peuvent entraîner d’importantes décisions médicales. Pour aider les membres des AA à trouver le meilleur équilibre possible et à réduire les risques de rechute, un groupe de médecins membres des AA ont élaboré les suggestions qui suivent. De plus, deux professionnels de la santé amis des AA à qui nous avons demandé de réviser cette brochure, pour offrir un point de vue professionnel, estiment qu’elle offre un éventail représentatif des alcooliques avec qui ils entrent en contact dans le cadre de leur fonction.
Il est normal que certains membres des AA prennent des médicaments pour traiter de graves problèmes de santé. Toutefois, il est généralement reconnu que la mauvaise utilisation des médicaments d’ordonnance et autres drogues peut compromettre l’atteinte et le maintien de l’abstinence. Il est possible de réduire les risques de rechute en tenant compte des suggestions suivantes :
• Un membre des AA ne devrait jamais « jouer au médecin» ; conseils et traitements ne devraient être offerts que par un médecin qualifié.
• La participation active au programme de rétablissement des AA constitue la meilleure sauvegarde contre la rechute alcoolique.
• Soyez totalement honnête avec votre médecin et avec vous-même au sujet de vos prises de médicaments. Avertissez votre médecin s’il vous arrive de sauter une dose ou d’en prendre plus que prescrit.
• Expliquez à votre médecin que vous ne buvez plus d’alcool et que vous essayez de mettre en pratique un nouveau mode de vie.
• Informez immédiatement votre médecin si vous ressentez l’envie d’augmenter votre dose de médicaments ou si les effets secondaires aggravent votre mal être.
• Soyez attentifs aux signes de changements dans votre comportement quand vous commencez une nouvelle médication ou quand on modifie la posologie.
• Si vous avez l’impression que votre médecin ne comprend pas votre problème, envisagez de prendre rendez-vous avec un médecin qui a de l’expérience dans le traitement de l’alcoolisme.
• Donnez à votre médecin un exemplaire de cette brochure.
Dès les premiers jours des Alcooliques anonymes, il est apparu que bon nombre d’alcooliques avaient tendance à devenir dépendants à des drogues autres que l’alcool. Il y eut plusieurs cas tragiques d’alcooliques qui, après avoir fait de grands efforts pour arrêter de boire, ont développé de sérieux problèmes avec une drogue différente. À maintes reprises, des membres ont parlé d’épisodes terrifiants qui avaient compromis leur abstinence à cause de la mauvaise utilisation de médicaments ou d’autres drogues.
L’expérience nous apprend que si certains médicaments sont sans danger pour la plupart des non-alcooliques lorsqu’ils suivent les conseils de leurs médecins, il est possible que ces mêmes médicaments affectent l’alcoolique d’une manière différente. Il s’avère souvent que ces substances, lorsqu’elles sont prises sans supervision médicale, peuvent créer une dépendance aussi dévastatrice que la dépendance à l’alcool.
Par conséquent, il est important de toujours consulter votre médecin si vous pensez qu’une médication pourrait vous aider ou vous être nécessaire.
La collaboration avec les milieux professionnels est l’un des objectifs des Alcooliques anonymes depuis leurs débuts. Les professionnels qui travaillent auprès des alcooliques ont un but en commun avec les Alcooliques anonymes : aider l’alcoolique à arrêter de boire et à mener une vie saine et utile. Comme on l’a vu à la lecture des récits de cette brochure, certains membres des AA doivent suivre des traitements médicamenteux. Toutefois, l’expérience nous a démontré que l’abus de tels médicaments peut compromettre l’atteinte et le maintien de la sobriété. Les suggestions offertes plus haut sont là pour aider les membres des AA à trouver le meilleur équilibre possible et à réduire les risques de rechute.
(Adapté de la brochure approuvée par la Conférence des Services généraux « Le membre des AA face à la médication et autres drogues ».)
Il existe des groupes des AA dans les grandes villes, les campagnes et les villages partout dans le monde. De nombreux intergroupes et bureaux centraux ont des sites web où vous trouverez de l’information sur les réunions locales des AA, et presque partout aux États-Unis comme au Canada vous trouverez un numéro de téléphone des AA. Ces ressources aideront à vous diriger vers une réunion près de chez vous. De plus, il est souvent possible d’obtenir de l’information sur les réunions locales des AA par les médecins et les infirmières, le clergé, les médias, la police, les hôpitaux et les centres de traitement pour alcooliques qui connaissent bien notre programme.
Chaque groupe des AA s’efforce d’offrir une salle de réunion où tous peuvent se sentir en sécurité dans un environnement sûr et accueillant. La formation et le fonctionnement d’un groupe des AA relèvent de la conscience de groupe de ses membres. Notre souffrance commune en tant qu’alcooliques et notre solution commune dans le programme des AA transcendent la plupart des difficultés, nous aidant à créer un environnement aussi sûr que possible dans lequel transmettre notre message d’espoir et de rétablissement à l’alcoolique qui souffre encore.
De nombreux alcooliques aux prises avec un problème de santé mentale sont à l’aise dans n’importe quel groupe des AA. Cependant, dans certaines régions, il existe des groupes spécialisés où il est peut-être plus facile pour ceux qui ont une maladie mentale de se reconnaître comme alcooliques ou de parler ouvertement de certaines questions personnelles.
L’expérience partagée des alcooliques abstinents est essentielle à notre sobriété. Il est vrai que les AA n’ont pas la solution à tous nos problèmes, mais si nous sommes disposés à suivre les simples suggestions du programme des AA, nous découvrirons une solution à notre alcoolisme et une façon de vivre sans alcool un jour à la fois.
Si vous n’arrivez pas à trouver un groupe dans votre région, contactez le Bureau des Services généraux, Box 459, Grand Central Station, New York, NY 10163, (212) 870-3400, www.aa.org. Ils vous mettront en contact avec le groupe des AA le plus près de chez vous.
1. Nous avons admis que nous étions impuis-sants devant l’alcool, que nous avions perdu la maî-trise de notre vie. 2. Nous en sommes venus à croire qu’une Puissance supérieure à nous-mêmes pouvait nous rendre la raison. 3. Nous avons décidé de confi er notre volon-té et notre vie aux soins de Dieu tel que nous Le concevions. 4. Nous avons procédé sans crainte à un inven-taire moral, approfondi de nous-mêmes. 5. Nous avons avoué à Dieu, à nous-mêmes et à un autre être humain la nature exacte de nos torts. 6. Nous étions tout à fait prêts à ce que Dieu élimine tous ces défauts. 7. Nous Lui avons humblement demandé de faire disparaître nos défauts. 8. Nous avons dressé une liste de toutes les personnes que nous avions lésées et nous avons consenti à réparer nos torts envers chacune d’elles. 9. Nous avons réparé nos torts directement envers ces personnes dans la mesure du possible, sauf lorsqu’en ce faisant, nous risquions de leur nuire ou de nuire à d’autres.10. Nous avons poursuivi notre inventaire per-sonnel et promptement admis nos torts dès que nous nous en sommes aperçus.11. Nous avons cherché par la prière et la mé-ditation à améliorer notre contact conscient avec Dieu, tel que nous Le concevions, Lui demandant seulement de connaître Sa volonté à notre égard et de nous donner la force de l’exécuter.12. Ayant connu un réveil spirituel comme ré-sultat de ces étapes, nous avons alors essayé de transmettre ce message à d’autres alcooliques et de mettre en pratique ces principes dans tous les domaines de notre vie.
1. Nous avons admis que nous étions impuis-sants devant l’alcool, que nous avions perdu la maî-trise de notre vie.
2. Nous en sommes venus à croire qu’une Puissance supérieure à nous-mêmes pouvait nous rendre la raison.
3. Nous avons décidé de confi er notre volon-té et notre vie aux soins de Dieu tel que nous Le concevions.
4. Nous avons procédé sans crainte à un inven-taire moral, approfondi de nous-mêmes.
5. Nous avons avoué à Dieu, à nous-mêmes et à un autre être humain la nature exacte de nos torts.
6. Nous étions tout à fait prêts à ce que Dieu élimine tous ces défauts.
7. Nous Lui avons humblement demandé de faire disparaître nos défauts.
8. Nous avons dressé une liste de toutes les personnes que nous avions lésées et nous avons consenti à réparer nos torts envers chacune d’elles.
9. Nous avons réparé nos torts directement envers ces personnes dans la mesure du possible, sauf lorsqu’en ce faisant, nous risquions de leur nuire ou de nuire à d’autres.
10. Nous avons poursuivi notre inventaire per-sonnel et promptement admis nos torts dès que nous nous en sommes aperçus.
11. Nous avons cherché par la prière et la mé-ditation à améliorer notre contact conscient avec Dieu, tel que nous Le concevions, Lui demandant seulement de connaître Sa volonté à notre égard et de nous donner la force de l’exécuter.
12. Ayant connu un réveil spirituel comme ré-sultat de ces étapes, nous avons alors essayé de transmettre ce message à d’autres alcooliques et de mettre en pratique ces principes dans tous les domaines de notre vie.
1. Notre bien-être commun devrait venir en pre-mier lieu ; le rétablissement personnel dépend de l’unité des AA.
2. Dans la poursuite de notre objectif commun, il n’existe qu’une seule autorité ultime : un Dieu d’amour tel qu’il peut se manifester dans notre conscience de groupe. Nos chefs ne sont que des serviteurs de confi ance, ils ne gouvernent pas.
3. Le désir d’arrêter de boire est la seule condi-tion pour être membre des AA.
4. Chaque groupe devrait être autonome, sauf sur les questions qui touchent d’autres groupes ou l’ensemble du Mouvement.
5. Chaque groupe n’a qu’un objectif primordial, transmettre son message à l’alcoolique qui souffre encore.
6. Un groupe ne devrait jamais endosser ou fi nancer d’autres organismes, qu’ils soient appa-rentés ou étrangers aux AA, ni leur prêter le nom des Alcooliques anonymes, de peur que les soucis d’argent, de propriété ou de prestige ne nous dis-traient de notre objectif premier.
7. Tous les groupes devraient subvenir entière-ment à leurs besoins et refuser les contributions de l’extérieur.
8. Le mouvement des Alcooliques anonymes devrait toujours demeurer non professionnel, mais nos centres de service peuvent engager des em-ployés qualifiés.
9. Comme Mouvement, les Alcooliques ano-nymes ne devraient jamais avoir de structure for-melle, mais nous pouvons constituer des conseils ou des comités de service directement respon-sables envers ceux qu’ils servent.
10. Le mouvement des Alcooliques anonymes n’exprime aucune opinion sur des sujets étrangers ; le nom des AA ne devrait donc jamais être mêlé à des controverses publiques.
11. La politique de nos relations publiques est basée sur l’attrait plutôt que sur la réclame ; nous devons toujours garder l’anonymat personnel dans la presse écrite et parlée de même qu’au cinéma.
12. L’anonymat est la base spirituelle de toutes nos traditions et nous rappelle sans cesse de placer les principes au-dessus des personnalités.
Parce que nous sommes responsables de l’avenir des AA,
nous devons : placer notre bien-être commun en premier
lieu et préserver l’unité de l’association des AA, car de cette
unité dépendent nos vies et celles des membres à venir.
rappelle sans cesse de placer les principes au-dessus des personnalités.
Si quelqu’un quelque part tend la main en quête d’aide, je
veux que celle des AA soit toujours là.
Et de cela : Je suis responsable.
3920, rue Rachel Est
Montréal (Québec) H1X 1Z3
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